Un couvre feu féministe

Longtemps on a été tolérantes. On a laissé les agresseurs en toute impunité. On les a invités sur des plateaux télé, on a rappelé la présomption d’innocence, on a pardonné.
Longtemps on a été tolérantes. On a laissé nos amies se faire aborder à la sortie du collège. Nos mères, dans le métro se faire frotter. Nos sœurs, en tout temps, en tout lieu, slutshamées.

Pour lutter contre l’insécurité dans la rue, dans l’obscurité, des tas de solutions ont émergé. Plus de caméras, de chiens de garde, de policiers ? Mmh. Certains partis affectionnent particulièrement ces options sécuritaires, mais elles ne font pas l’unanimité. Après une division genrée du travail, une division genrée de la ville a été proposée : une partie de la ville pourrait être réservée aux personnes sexisées, mais ce n’est pas pratique dans une société basée sur l’hétéronormativité.

On a alors pensé au couvre-feu, très populaire depuis le Covid et dans certains territoires d’Outre-mer français. Le jour, toute personne serait libre de circuler, mais le soir, tard, une fois finie la double journée, les femmes pourraient sortir en toute sérénité. Se balader, faire un karaoké, distinguer les étoiles dans un ciel trop pollué -ah non, ça c’est un avion. Marcher en bande, crier à tue-tête, camper à Gif-sur-Yvette. Rentrer bourrée, sans peur d’être raccompagnée contre son gré. Mettre un mini-short -pas quand il fait froid. Aller au cinéma voir un film en VO après 22h. Écarter les buissons à Vincennes pour trouver une freeparty cachée. Courir super vite même si super vite c’est 7km/h parce que tu comprends aujourd’hui c’était horrible au boulot j’ai toujours plus de tâches mais mon stage n’est pas rémunéré. Passer ses appels dehors la nuit tombée, assise sur le porche. Regarder les filles passer. Faire un compliment mais pas pour choper. Parce qu’elles sont libres, courageuses et que j’admire leur individualité.


Magali