24 mars
lundi 30 mars 2020 - Ce qui nous empêche
Les voitures habituelles passent avec leur descriptif superposé en méta-données sur la vitre de ma fenêtre. Je sors les poubelles comme on rentre victorieux d’une Coupe du Monde et un scooter Uber-eats passe. Là, j’ai bien vu son sac, malgré sa vitesse, le logo. Encore aujourd’hui, ça se produit. Mais à côté de ça, de cette exception, le désert est bien là, le respect des règles de sécurité commune est là. La puissance de la bascule qui s’est opérée, si vite, comment le penser ? C’est ça aussi qu’il faut voir, je me dis ça. Quels sont les outils de pensée là-dessus, sur ce collectif soudain, qui est aussi plein de distance, sans parole — à part les applaudissements de 20h ? La société individualiste et de rentabilité qui se retourne si vite en ce collectif qui prend soin de tous et met la machine (presque) en pause. Ce "presque", d’ailleurs, désobéir aujourd’hui c’est améliorer les décisions du gouvernement : et pas seulement se confiner mieux, fabriquer son masque, peut-être continuer à rester chez soi si le confinement est levé "trop tôt", se confiner ailleurs "avant" que le gouvernement ne le décrète, etc., c’est aussi débrayer, arrêter la chaîne inutile, refuser de servir, de livrer si ça n’est pas justifié. Et ce collectif soudain, comme les Gilets Jaunes, comme la grève de décembre/janvier, comme Nuit Debout, tous ces éclats de collectif qui tardent à prendre et à pousser, reviendront, réessayeront.