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Fenêtres Valdivi... Vivaldi

vendredi 21 décembre 2018, par Amelie Fezzai

Les enfants naissent dans les choux. Ou les roses. Notre bâtiment est né dans une jolie ville. Il a grandi vite. Il a fière allure. C’est la Villa VALDIVI. Il est lumineux, il est tout neuf, il est beau.
Je crois que c’est aujourd’hui que viennent les personnes qui lui donneront véritablement vie.

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Je crois qu’il est plus que beau. Il est fascinant. Mon regard se pose sur son crépit frais, tout clair, tout propre, puis il se met à survoler sa façade, sautille comme un oiseau sur des perchoirs, de fenêtre en fenêtre.

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Je crois qu’il y a des ombres qui s’agitent derrière ces fenêtres. Ou des reflets. Cela bouge. Cela vit, derrière ces vitres. C’est intriguant.
Le jour, la lumière dévoile des reflets, des images en miroir des habitants, plus ou moins lisibles. La nuit, la lumière est à l’intérieur, et elle projette sur ses fenêtres de simples silhouettes noires, ombres chinoises, dessins grossiers.

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Je crois qu’il y a tout un monde derrière ces figures inconnues et indistinctes. Des personnes de toutes tailles, de tous les horizons, de toutes les couleurs, comme les personnages d’une histoire. Une histoire qui s’écrit, une vie qui se déroule à l’abri des regards… ou presque. C’est peut-être plus comme une pièce de théâtre derrière ces rideaux. Un théâtre réel, un théâtre mouvant, les acteurs peuvent changer, les scènes peuvent passer de la comédie, à la tragédie, à l’absurde. C’est la vie.

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Je crois que des enfants viendraient coller leur nez sur le verre glacial de ces fenêtres quand viendra l’hiver. Le son étouffé d’une voix maternelle se ferait entendre de loin, vague reproche (« n’attrapez pas froid ! »), que les petits n’écouteraient pas. Ils dessineraient dans la buée qu’ils auraient créée, un sourire aux lèvres, malicieux.

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Je crois voir là, penchée sur sa fenêtre, une jeune fille aux yeux humides. Mélancolique, elle pleurerait, pour rien, pour tout. Comment savoir ? Elle est douce, et serait peut-être simplement émue par les allées roussies par l’automne et grisées par la pluie. Une feuille brune volerait jusque sur son nez, et elle sourirait alors, elle aussi. Le paysage est aussi chagrin qu’elle, mais vient lui accorder un petit salut ainsi, cela la toucherait. Mélancolique, mélancolique…

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Je crois qu’un couple, en toute simplicité, viendrait s’enlacer tendrement ici. Cliché doux, mais cliché rassurant. Le soleil baignerait la scène, c’est l’été, il fait chaud. Un murmure que personne n’entendrait glisserait des lèvres de l’un à l’oreille de l’autre. J’aurais aimé entendre. Ou plutôt non. C’est trop intime. Mais j’ai peut-être une pointe de jalousie, moi qui fais marche solitaire…

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Je crois qu’un visage plissé par les ans, les cheveux blanchis par le temps, apparaîtrait, une fois les volets ouverts, au début d’une nouvelle journée printanière. La dame soufflerait sur ses fleurs, ses belles plantes qu’elle dorlote depuis des semaines en attendant le redoux de la nouvelle saison. La vieille femme ferme les yeux. Son printemps est loin derrière elle, mais ces fleurs la trompent volontiers…

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Je crois que moi aussi je me trompe de saison. Je ne sais pas.
Mais les gens sont là. Nous verrons bien laquelle des quatre fenêtres s’ouvrira.

A.F

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